La valeur de la Terre ou la valorisation des espaces fonciers par la biodiversité ; comment le génie écologique enrichit le patrimoine naturel privé ou public
La diversité des espèces animales et végétales est la garantie d’un équilibre et d’un renouvellement de la vie ; c’est un enjeu majeur de notre siècle, au même titre que le réchauffement climatique.
La biodiversité française
La biodiversité française est particulièrement riche, car notre pays est un carrefour migratoire au centre de plusieurs régions bioclimatiques. De plus, l’influence de l’Homme qui a défriché, cultivé et élevé sur cette terre a considérablement augmenté le potentiel naturel, en créant des mosaïques de milieux. Un équilibre harmonieux entre la vie sauvage et l’Homme s’est institué au fil des siècles. L’histoire et les pratiques traditionnelles sont en grande partie à l’origine de la diversité naturelle française.
Mais les constats scientifiques sont sans appels : on assiste depuis une cinquantaine d’années à une érosion régulière et continue de cette diversité,indispensable à la stabilité naturelle. Cette érosion est essentiellement due à la fragmentation et la dégradation des espaces de vie – ou habitats naturels - des populations vivantes. La disparition des pratiques ancestrales qui avaient permis à la vie de se développer modifie l’équilibre écologique. Il ne s’agit pas de remettre en cause des méthodes agricoles ou les enjeux économiques, souvent légitimes, mais d’intégrer la globalité des communautés vivant sur un territoire donné dans ces activités, pour conserver la véritable valeur de la terre.
La valeur de la terre
Le patrimoine naturel d’une terre sera vraisemblablement un point central pour sa valorisation dans les prochaines décennies. De nouvelles questions apparaissent : les terres que je lègue à mes enfants abritent elles autant de vie que celles reçues de mon père ? La valeur d’une terre est elle uniquement liée à son potentiel économique, forestier ou agricole, ou bien à la globalité de ses richesses naturelles ? Ai-je une quelconque responsabilité dans l’avenir des êtres vivants qui logent sur ma terre ? Ma logique immobilière est elle compatible avec la dynamique naturelle globale du territoire ?
La valorisation de la terre n’est plus simplement liée à un potentiel économique à moyen terme, mais est pondérée par la vie qu’elle peut abriter et protéger.
La vraie dimension du patrimoine naturel
L’absence apparente de valorisation économique du patrimoine naturel a bien souvent été la cause de sa destruction. Cette tendance est maintenant sur le déclin, car l’aspect économique n’est qu’une appréhension partielle de la valeur d’un bien.
Le parallèle peut aisément être fait avec le patrimoine culturel ou historique : quelle est la valeur économique d’un manoir ou d’un château ? Les frais d’entretien interdisent le plus souvent de parler de rentabilité, et les cours immobiliers de tels biens sont indépendants du marché local. Leur valorisation est en effet patrimoniale, et c’est le message qu’ils transmettent par delà les générations qui leur donne leur véritable valeur. C’est pourquoi les propriétaires et les mécènes n’entrent pas dans une logique économique ou comptable dans leur appréciation.
Le même raisonnement s’applique au patrimoine naturel. Une simple approche économique est trop réductrice, mais sa dimension universelle justifie des investissements conséquents pour l’avenir.
Les actions en faveur de la vie
Si nous n’avons pas aujourd’hui les moyens de mesurer toutes les conséquences de la perte de la biodiversité, il est cependant possible d’agir concrètement, simplement et efficacement pour l’ensemble des communautés vivantes, en restituant des zones de vies aux différentes populations, rares ou communes, pour leur reproduction, leur alimentation et leur protection : ce sont les habitats naturels, qui sont à la base du patrimoine écologique d’un territoire.
Les pouvoirs publics ont déjà apporté des réponses, à travers un cadre législatif et l’instauration de zones de protection réglementées. De nombreuses associations s’attachent à protéger des sites sensibles. Il est maintenant possible d’étendre ces actions à d’autres espaces, pour reconquérir la biodiversité, et pas seulement pour la défendre. Les grands espaces boisés ou agricoles peuvent abriter des pôles réservés à la biodiversité, reliés entre eux par des corridors, sans que cela soit un obstacle à l’activité économique, agricole ou forestière. Toute parcelle ne faisant pas l’objet d’une exploitation peut abriter des écosystèmes, et l’ensemble des acteurs est ainsi invité à oeuvrer pour la vie, propriétaires privés, publics ou entreprise. Il s’agit simplement de concilier les habitudes de vie des communautés humaines, végétales ou animales, en ayant une vision globale pour intégrer les différents paramètres de l’équation.
La compensation écologique lors des projets d’infrastructures
Afin de préserver la vie lors d’un projet d’infrastructures, il est toujours possible d’offrir aux populations vivantes un espace de compensation lorsque l’on est contraint de détruire ou d’altérer leur milieu naturel. Il ne s’agit pas forcément d’espèces rares ou protégées, mais aussi des espèces ordinaires, qui risquent de devenir rares ou protégées si on n’y prend garde… Les spécialistes du génie écologique interviennent en amont du projet pour identifier les communautés probablement sinistrées, et conseiller le maître d’ouvrage pour une préemption plus large du territoire à aménager, sur lequel les habitats naturels pourront être préservés ou déplacés. Si ce territoire est proche du projet immobilier, il pourra aussi être partiellement un lieu de loisir et de pédagogie, valorisant ainsi le projet. L’opération deviendra alors globale : lorsque le génie civil interviendra pour la construction des infrastructures humaines, le génie écologique aménagera des habitats naturels. Le surcoût de l’opération est proportionnellement dérisoire dés lors qu’elle est anticipée dès la conception du projet. Son retour en termes de communication peut même en faire une opération « rentable ».
La compensation de l’empreinte écologique industrielle
Il est logique qu’une activité industrielle ait un impact sur son environnement, mais il est tout aussi logique d’en prendre conscience et de l’atténuer dans la mesure du possible. La compensation consiste, pour une entreprise, à agir concrètement sur un territoire – lui appartenant ou non – pour créer des réserves de biodiversité, proportionnellement à son empreinte écologique. Ces zones sont aménagées en fonction des dynamiques naturelles pour offrir des habitats parfaitement adaptés à la faune et à la flore locale. C’est ensuite un témoignage visible, durable et objectif de l’implantation responsable de l’entreprise dans son environnement immédiat. La réserve biodiversifiée en compensation de l’empreinte écologique devient un véritable outil de communication interne et externe.
Le génie écologique : une réponse au défi de la biodiversité
Pour réaliser ces objectifs, le génie écologique veut proposer des solutions pragmatiques et opérationnelles. Son enjeu est de favoriser la biodiversité par des actions adaptées sur les espaces fonciers, en restaurant ou réhabilitant des habitats naturels.
Les spécialistes du génie écologique – de l’ouvrier à l’ingénieur – sont de véritables artisans de la biodiversité, qui apportent leur expertise et leurs outils pour rebâtir des espaces de vie. Ils sont ainsi les partenaires privilégiés des propriétaires ou gestionnaires pour la valorisation et la préservation d’un territoire.
Ces nouveaux métiers accompagnent les professionnels de l’immobilier, de l’urbanisme ou de l’exploitation rurale pour conserver une juste compatibilité entre exploitation humaine et vie naturelle.
L’enrichissement du patrimoine naturel d’un territoire par le génie écologique
Le génie écologique est une démarche qui regroupe études, travaux et gestion sur plusieurs années. Il s’agit en effet de préserver durablement des lieux de vies pour les populations animales ou végétales, en se substituant le plus souvent aux pratiques traditionnelles qui leur avaient permis d’exister.
La première étape consiste à établir un diagnostic précis de la valeur patrimoniale du milieu, et prenant en compte ses relations avec sa matrice, c'est-à dire le territoire qui l’entoure. Ces études permettent de cerner le potentiel écologique, de prévoir des prospectives, d’identifier les menaces et contraintes, et de dresser un plan de gestion pour la conservation et le développement des communautés vivantes.
Des travaux de restauration, réhabilitation ou requalification du site sont le plus souvent nécessaires et constituent la deuxième étape. Ces actions créent les conditions propices au fonctionnement naturel du milieu.
La troisième étape est la gestion proprement dite, qui pérennise les prescriptions de l’étude initiale.
Ces trois étapes sont systématiquement accompagnées d’actions de concertation et de communication, afin de concilier les différentes contraintes du site, humaines et naturelles.
Le génie écologique, une réponse durable aux enjeux environnementaux des espaces fonciers
Le génie écologique est une profession nouvelle sur une démarche innovante, qui est pleinement inscrite dans une logique de gestion durable. Il associe les aspects économiques, sociaux et écologiques pour répondre aux questions cruciales de la valeur patrimoniale naturelle d’une terre.
Cette profession sera de plus en plus associée à la dynamique économique pour un objectif commun : la transmission d’un patrimoine riche et varié aux générations futures.
Auteur : Patrice Valantin , contact(arobase)dervenn.com