L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a publié un rapport sur les expositions professionnelles aux pesticides. Les agriculteurs et tous les travailleurs agricoles sont mal protégés et mal informés.
Ce rapport était attendu depuis 5 ans. L'Anses a voulu identifier, évaluer et caractériser les expositions aux pesticides de l'ensemble des travailleurs agricoles, qui sont plus d'un million en France.
Les produits étudiés sont les familles de pesticides, fongicides, herbicides, biocides (pour la désinfection du matériel) et les médicaments vétérinaires utilisés pour les animaux.
L'Anses rappelle que des études épidémiologiques ont fait un lien direct entre l'exposition aux pesticides et des maladies chroniques.
Elle pointe notamment l'expertise de l'Inserm sur l'association entre exposition aux pesticides et "cancers (hémopathies malignes, cancers de la prostate, tumeurs cérébrales, cancers cutanés...), certaines maladies neurologiques (maladie de Parkinson, maladie d’Alzheimer, troubles cognitifs...) et certains troubles de la reproduction et du développement, liés à des expositions à différents pesticides ou classes de pesticides, avec des niveaux de présomption pouvant aller de faible à fort selon les cas".
Manque d'information, de protection, trop de pesticides utilisés
Le rapport souligne en premier lieu les données "lacunaires" relatives aux expositions aux pesticides des personnes travaillant dans l'agriculture, et pointe le besoin impératif de produire des données prenant en compte la diversité des personnes exposées, des sources d'expositions, des pesticides utilisés, le tout réalisé par des études indépendantes.
L'Agence prône l'harmonisation et l'évolution des méthodes d'évaluation des expositions à l'échelle européenne pour les autorisations de mise sur le marché des substances. "Les modèles concernant l’exposition utilisés dans le cadre de la démarche d’homologation des pesticides reposent principalement sur des études générées par les fabricants de pesticides, n’ayant généralement pas donné lieu à des publications scientifiques selon une procédure de relecture par des pairs" rappelle l'Anses.
L'Anses souligne également la nécessité de renforcer la connaissance et l'efficacité des équipements de protection, de conseiller et former les utilisateurs de pesticides sur leurs dangers, en intégrant les contraintes des utilisateurs. Elle dénonce "l’existence de conflits d’intérêts potentiels lorsque le conseil et la formation sur l’utilisation des pesticides sont liés à la vente de ces produits", avec un niveau de sensibilisation insatisfaisant sur les dangers et la sécurité.
Pour l'Anses, il faut notamment "inclure dans les politiques d’usage des pesticides des objectifs de protection des travailleurs et des riverains, au même titre que des objectifs de protection de l’environnement et des consommateurs".
L'Agence rappelle l'importance de diminuer le recours aux pesticides. La France, premier consommateur européen de produits phytosanitaires, a complètement échoué à réduire l'usage des pesticides dans son premier plan Ecophyto. Le second plan, qui repousse à 2025 l'objectif de diminuer de 50 % l'usage des pesticides en France, vient d'être mis en place.